Week end à Takapoto

Publié le par JJMSO

Ici, le temps s’écoule paisiblement. Les jours commencent à rallonger doucement et la chaleur devient parfois de plus en plus étouffante, mais cela reste supportable car la météo est assez changeante. Pluie le soir, beau temps le matin, vent l’après midi… Un peu de tout le même jour ou l’inverse. Je vis quand même tout le temps en pantalon court et chemise au boulot, tee-shirt à la maison, tongs dans les pieds quand ce n’est pas pieds nus. Ça ressemble un peu à la vie des  Antilles question climat, mais rien à voir au niveau du rythme ni des gens…  pas de zouk ici, pas de bruit, pas de cris, tout est calme, hormis quelques pots d’échappement  de vieux 4X4 et bien sûr le ronron des groupes électrogènes, le soir. Les plus vieux comme le mien, au gas-oil, font nettement moins de bruit que les groupes neufs qui tournent à l’essence. Un détail peut être mais comme c’est tous les soirs, on remarque. Ici, moins de chiens qu’à la Réunion, ou plutôt moins d’aboiements, car ils sont en liberté pour la plupart, et vivent en meute dans la brousse. Parfois, il faut ruser en vélo quand ils ont décidé de te courir après. Les coqs, ça par contre, faut pas être allergique, car ils pètent souvent les plombs et chantent n’importe quand. En plus je dois en avoir au moins 3, en liberté aussi, mais fidèles au pied d’huru (fruit à pain) qui trône dans le parc. Toute la volaille dort dans cet arbre, parfois perchée à plus de 5 m de haut.

Voilà donc pour le décor. Le vent dans les palmes de cocotiers, le bruit des vagues dans le lagon, les oiseaux de mer en pêche, la basse cour en délire, les groupes et les moteurs hors bord qui passent, toujours à fond.


 Cap sud-ouest vers Takapoto

L’atoll voisin c’est Takapoto. A une heure de navigation en canot à moteur (100 CV minimum). Là-bas, c’est pire. Le temps s’est arrêté. Personne dans le charmant petit village, à part quelques cyclistes et un ou 2 véhicules tout terrain, hors d’âge. L’accès par la mer est assez périlleux, genre Grand Rivière en Martinique. Faut surfer une vague, virer à 90° et s’arrêter net face au quai. Puis, c’est le yoyo pour débarquer. A Takapoto, les cargos n’accostent pas, ce sont les baleinières qui font des navettes avec le fret, y compris les véhicules, les palettes de ciment… enfin, tout ce qu’il faut pour vivre et construire. La crise du tourisme a eu raison des minces infrastructures locales, parachevant la débâcle qui a suivi l’effondrement du cours de la perle noire. Résultat, une île fantôme, mais un petit paradis. J’y ai croisé  un des seuls Français de l’île, un retraité des douanes, originaire de Perpignan et à la recherche du paradis pour ses vieux jours. Il a quand même du mal avec la houle et doit laisser son canot à l’extérieur sur le coffre visiteur. Il a passé une partie de sa carrière à St Martin et peut enfin respirer, dans cette île où les délinquants sont recherchés pour vol de poule, ça change des dealers de crack. Peu de gens donc à Takapoto, mais le dimanche tout le monde déambule en costume pour l’office. L’œuvre des missionnaires reste encore bien visible et qui, catholique ou protestant, mormon ou sanito, évangéliste ou baptiste, se disputent la Sainte parole et rivalisent de jolis chants. Bref, Jésus est partout, sous différentes formes, héros de nombreux romans, tous différents et finalement tous identiques. Amen.


  Darse de Takapoto. Le potimarara en jaune est un bateau construit spécifiquement pour la pêche à l'exocet, le poisson volant. Mais il est surtout utilisé ici pour la pêche de la dorade corryphène. Le pêcheur se tient debout dans un emplacement très étroit à l'avant. Il se dirige avec une barre qu'il actionne verticalemnt de babord à tribord. Ce bateau est très marin et contrairement au plan calin, à côté, il ne mouille pas les passagers qui doivent, par contre, se tenir debouts et bien cramponnés.



La godaille... Après une heure de pêche au fond, à 4 pêcheurs, et il paraît que ça ne mord pas dans le lagon de Takapoto ! C'est vrai que c'est un lagon fermé, il n'y a pas de passe. La mairesse qui nous accompagnait ce jour là nous expliquait la nécessité de procéder au creusement d'une passe artificielle. Eh oui, le lagon se meurt, les coraux étouffent, l'IRD a dit, alors!

Retour  à Takaroa,

Takaroa reste encore un des derniers bastions de l’huître perlière. 1500 personnes y vivent, dont près de 500 sont les ouvriers des fermes perlières. Même si l’âge d’or, dont on peut voir les vestiges rouillés devant certains farés (scooters des mers, 4X4 américains, paraboles et super congèl) est bien derrière nous, certaines fermes continuent et échangent encore, avec les Chinois, premiers acheteurs sur ce marché. Certaines ouvrières, spécialisées dans la greffe des huîtres, viennent d’ailleurs de ce pays. Le reste de l’économie locale c’est le coprah, la noix de coco super abondante sur ces atolls, dont on extrait la pulpe séchée pour en faire de l’huile, pour cosmétique, ou alimentaire selon la qualité. Mais cette filière là va décroître également dans les années à venir. Trop de subventions, des usines pas assez rentables, une économie mondiale qui se fout de ces micros productions locales. Bref, le bordel de la mondialisation quoi ! Mais que vont-ils devenir ? Des futurs migrants. Préparez-vous, pays riches, les grands déplacements de population n’ont pas encore eu lieu !... 

A Takapoto, les classes de l’école ferment au rythme d’une par an. A Takaroa, le sursis est évident.

Cette semaine, les cours sont un peu perturbés car le dentiste est dans l’île. Les classes, en commençant par les CM2 lundi et finissant par les Petites Sections vendredi, vont à tour de rôle, en car scolaire, chez le dentiste. Pourtant j’aurai envie d’écrire au dentiste  (même s'il n'a pas l'allure bovine)car celui-ci n’a pas plus de cabinet que moi sur l’atoll. Il tient sa permanence, tel un député breton, à l’infirmerie. Et voit ainsi défiler la populace et ses chicots. Bizarre non ? mais c’est comme ça. Pour avoir un ordre d’idée, il faut imaginer une vingtaine d’élèves, déboulant avec leur maitresse dès 8h du matin, puis les gens sans rendez vous faisant la queue, entre midi et 2, puis une autre classe de 13h30 à 15h30, et encore d’autres impatients le soir.

Ça c’est les Tuamotu... archipel éloigné.

1500 personnes, 1 mairesse, 1 policier, 1 postière, 1 infirmier, 10 instits, fin.

Mais cette semaine aussi, surprise : un Transal a lâché  3 gendarmes de Tahiti. Cet avion étrange est arrivé lundi et le bruit des moteurs à l’atterrissage a surpris tout le monde car il ne vient pas d’avion de ligne d’habitude ce jour là. Ceux-ci viennent régler les affaires en cours m’a-t-on dit. Les affaires de vol, de partage de terrain (gros problème ici), les diverses plaintes de voisinage, et pourquoi pas effectuer quelques contrôles routiers. Ici, les gens balisent un peu : pas d’assurance, pas de casque, véhicules pas du tout conformes à la sécurité élémentaire, peut-être aussi pas de permis de conduire. Après tout, ils ne viennent que 2 fois par an et restent 5 jours, alors…

Voilà, j’arrête pour aujourd’hui de vous raconter ma vie, mon nouveau décor, mais c’est toujours intéressant de changer de planète, ça donne du recul. Enfin comme si avancer donnait du recul !… Bon allez, là, j’arrête le délire. Et comme disait la poupée de Lucie, il y a quelques années : « la mer est belle, j’aime nager, tu viens te baigner ?….. »

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P
<br /> Ah! enfin du solide. Voilà comme on l'aime notre JJ, à la pointe de l'info !<br /> Ici demain grand raid, comme d'hab nous le faisons vu de st Jo.<br /> On vous tient au courant<br /> <br /> <br />
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